1 Je ne me souviens plus, je ne me souviens pas… Jamais je n'ai eu de mémoire. Aujourd'hui, aujourd'hui, j'ai soixante dix ans ans et de ces vingt huit mille et cent cinq jours qui font mon existence, je n'ai souvenir que d'une petite poignée. Je n'ai, de plus, aucune certitude que ce reste ridicule, appréciable sur les doigts de mes mains, ait bien constitué la quintessence de ma vie. Je crains d'être passé à côté de l'essentiel, de ne constituer mes souvenirs que de choses futiles comme de ces couleurs criardes qui sur certaines toiles gênent la perception des nuances plus fines. Aussi, une de mes obsessions les plus fortes, les plus récurrentes, a toujours été, pour une raison ou une autre, d'être interrogé un jour par un quelconque inspecteur de police dont la question serait : "Qu'avez-vous fait à telle date et à telle heure ?…" et ceci quand bien même la date ne remonterait que deux ou trois jours en arrière. Sans avoir jamais...
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Affichage des articles du septembre, 2023
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2 C’était autour de 1950, j’avais alors 8 ou 9 ans et mon frère cadet, qui me suivait partout et me servait trop souvent de cobaye, en avait alors 6 ou 7. Notre père avait été tué à la fin de la deuxième guerre mondiale dans des circonstances peu claires et que je n’ai jamais, malgré mes recherches, réussi à comprendre. Notre mère, veuve et mère trop jeune, avait totalement délégué le soin de notre éducation à nos grand parents maternels chez qui nous vivions étant interdits d’intrusion dans l’appartement maternel. Ils étaient adorables et nous adoraient, mais ils étaient aussi trop pauvres et trop âgés pour nous inculquer une réelle éducation. Le grand-père ne s’occupait de nous que pour nous apprendre la nature autour de ses piliers favoris : pêche, chasse, braconnage, jardinage. Pour les reste nous étions libres comme l’air et si on nous menaçait parfois du fouet, celui-ci faisait en fait peu d’usage. Notre mère, que nous ne voyons que de loin en loin, ne s’intéressait, par...
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3 La ville où je suis né est enclavée au fond d’une vallée profonde entre au Nord, de grands plateaux granitiques ; au sud un petit causse calcaire ultime étape avant les cévennes schisteuses. Particularité qui, outre le massacre qu’y commit le capitaine Merle à la Noël 1579, la destina au XVI ème siècle à être le rempart contre le protestantisme cévenol. C’était donc une minuscule ville où la religion était alors présente avec force : plusieurs églises et couvents, plusieurs écoles « libres » deux séminaires, deux cathédrale pour une population d’environ 5000 habitants. La religion catholique représentait à la fois un modèle et un repoussoir qui partageait bien des familles. J’ignore quelle attitude mon père adoptait devant la religion mais le reste de la famille était plutôt du genre athée revendiqué chez les hommes et croyant par prudence pour les femmes. On était ainsi constamment dans une attitude bancale : le grand-père et mes oncles ricanaient ou même coa...
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4 Ainsi, si je remonte dans ma plus lointaine enfance, à l'aube même de ce que l'on peut appeler ma mémoire, s'imposent deux images distinctes dont je ne saurais dire laquelle précède réellement l'autre. Vouloir se rappeler de tout ?… Est-il possible de revivre ? La première est celle d'une vieille femme assise dans un fauteuil, et l’image que j’en conserve me fait penser qu’il s’agissait d’un fauteuil Voltaire au dossier haut. La peau de son visage est fripée comme ces pommes reinettes que mes grands parents déposaient dans leur grenier pour les conserver le plus longtemps possible. Elle porte une toute petite coiffe de dentelle noire, parle lentement d'une voix faible et fatiguée. Nous — mais qui étaient ce nous ?…— sommes venus la voir quelques maisons en contrebas de l’appartement de mes grands parents, trois marches hautes sur la rue devant la maison puis un petit escalier de bois étroit aux marches de bois craquantes. Quelqu'un, dont je ne revois rien,...
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5 De 6-7 à 13-14 ans, nous vivions en bandes, nous étions des enfants de la rue. Nous vivions à une dizaine d’enfants mâles dans ce que nous appelions notre quartier, c’est-à-dire quatre rues formant un quadrilatère d’environ 100 mètres sur cinquante mais qui, alors nous paraissait plutôt vaste. Notre petite ville était ainsi divisée en cinq quartiers qui occupaient le centre ancien avec ses petites ruelles sales sur les murs desquelles, n’ayant guère d’autre choix, les habitants mâles ne se privaient pas d’uriner malgré les nombreuses inscriptions au pochoir déclarant qu’il était interdit de le faire. Tout le reste, essentiellement hors du tracé encore bien visible des anciennes murailles, n’était qu’un territoire inclassable où nous ne nous aventurions que rarement. Car ce qui faisait la cohésion et la force particulière d’une bande, c’est qu’il y en avait d’autres auxquelles s’opposer par tous les moyens possibles. Le centre, plus exactement le centre vital, le point naturel de rall...
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6 Reprendre. De la période de notre vie où nous étions qualifiés de bébé, à celle où nous devenions des garçons, jusqu’à l’adolescence, où d’autres aventures nous appelaient, nous vivions en bandes, nous étions des enfants de la rue où, quel que soit le temps extérieur nous nous retrouvions dès que l’école nous laissait libres. Pour nos familles nous étions des garnements ou des chenapans, pour les commerçants de notre quartier, généralement catholiques bien pensants, à peine petits bourgeois mais cependant très timorés craignant de perdre quoi que ce soit du peu qu’ils possédaient et s’y accrochant sans répit, nous étions des petits voyous et ce même si aucun d’entre nous n’est jamais devenu un voyou, encore moins un grand voyou. Car si nous vivions dans la rue c’était tout simplement que nous n’avions aucun autre lieu qui nous soit autorisé. Les appartements de nos parents étaient minuscules, parfois insalubres ou du moins très dégradés, abritant, pour la plupart plusieurs enfants et...
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7 Par quel bout prendre cette tentative d’autobiographie insincère tant il me semble que la moindre des anecdotes ne peut se comprendre sans une préalable description de la totalité du contexte. Je me répète : nous étions des enfants de la rue où nous vivions en bandes dans un petit quadrilatère où tout habitant connaissait les autres. Notre vie, pour l’essentiel, se déroulait ainsi dans trois mondes très différents bien que pas totalement étanches : celui de l’école où nous attendions que le temps passe, celui de la famille où nous passions par nécessité le moins de temps possible et celui de la bande où le temps nous semblait toujours trop court même si, pour une très grande part, nous ne faisions rien d’autre que parler et écouter avec une certaine admiration les exploits de nos chefs auto-proclamés avant, par diverses épreuves, de monter dans la hiérarchie implicite. Dans une vie où tout semblait obéir à un agenda écrit d’avance, la bande par sa capacité d’invention de sti...
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8 Se répéter n’est pas toujours radoter : nous étions des enfants de la rue mais nous étions aussi des enfants de la guerre car les naissances des plus grands ou des plus petits s’échelonnaient entre 1935 et 1945. Or cette réalité guerrière nous avait imprégnés à plus d’un titre. D’abord par des atteintes diverses comme la mort de mon père ou le frère d’un d’entre nous fusillé par les allemands en 1944 lors d’une escarmouche avec le maquis, et des atteintes moins directes mais cependant ayant marqué les jeunes esprits de la bande comme le massacre, vers la fin de la guerre, de 28 jeunes résistants torturés et fusillés alors que, trahis, ils s’étaient rendus sous la promesse d’être bien traités. Cette guerre avait aussi laissé des traces matérielles comme la petite caisse de grenades allemandes laissée dans le grenier de mon grand-père ou, dans une petite vallée alors déserte, à la limite ouest de la ville et qui avait certainement servi de champ de tir les nombreuses douilles que n...
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9 Chaque bande avait deux territoires : celui, naturel, incontesté, du pâté de maison où vivaient les parents, et celui sauvage du pan de montagne qu’elle s’était attribuée car la ville s’était bâtie dans une vallée encaissée avec plus de 300 mètres de dénivelé entre la rivière et les plateaux qui la dominaient, calcaires au sud, granitiques au nord. Le versant sud, seul, très boisé, rocheux, était celui que nous nous disputions car le versant nord, ensoleillé, beaucoup moins rocheux était largement occupé par des maisons et villas que, d’un commun accord, nous considérions comme bourgeoises et où aucun de nous ne vivait. Le territoire de la bande qui m’avait accueilli et que nous défendions âprement contre toute tentative d’annexion, était situé autour d’une source appelée la fontaine du renard, appellation dont l’origine, sûrement ancienne, nous était inconnue mais dont la référence à une bête sauvage et réputée rusée nous convenait à merveille. Cette source, au flot peu abondant...
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10 Je lis, j’ai lu, toujours, beaucoup, souvent, partout, n’importe quoi… Il me semble que j’ai toujours lu. Grâce aux lectures tendrement attentives que me faisait ma grand mère dès ma plus petite enfance, je savais lire avant la fin de mon école maternelle. Et je me suis toujours demandé pourquoi je lisais. D’où me vient ce besoin angoissant de m’abîmer dans ces pages couvertes de signes dont j’éprouve la plus grande difficulté à m’extraire, la tête hors du monde. J’ai dû lire des centaines de livres, un calcul sommaire m’apprend que si j’estime avoir commencé à lire à six ans, avec un rythme moyen (sûrement sous-estimé) de deux livres par semaine, j’en aurai lu environ 5500. C’est peu face aux millions de livres disponibles. C’est trop devant la mémoire qu’il m’en reste. De combien est-ce que je me souviens ? Vraiment : une centaine ; vaguement le double, peut-être le triple. La lecture est un énorme gâchis de temps qui me vole une part importante de mon existence. J’a...
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11 L’écriture parfois m’égare : il me faut revenir à ce qui était le projet initial de ces quelques écrits : laisser à mes enfants et petits enfants un témoignage sur leurs ancêtres, ne parler égoïstement que de mon enfance et tenter d’éviter toute digression. Je reviens donc aux faits tels que ma mémoire prétend les avoir retenus. Ce souvenir a la structure d’un rêve tant il est évident et inaccessible au souvenir construit. Une cour d’école, celle de l’école maternelle Saint Joseph. En effet dans mes textes précédents si j’ai dit Sainte Marie m’est, depuis, revenue la certitude absolue que c’était Saint Joseph. Logique, une école réservée aux garçons. Saint Joseph donc. La scène que je revois a les vérités d’une évidence. Pas besoin de preuves ni de déductions. Il fait beau, un soleil radieux et déjà tiède, ce doit être la fin d’un printemps. Nous sommes dans la cour de récréation dont je revois la surface fermée par un portail en métal bleu ajouré surmonté d’une croi...
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12 Enfant j’étais très sale ? Je n’étais pas le seul. Nous étions très sales mais c’était sans importance, tant cette saleté nous semblait naturelle. Les appartements de nos parents n’ayant pas de salle de bains, la plupart même pas de toilettes, se laver était loin d’être une tâche évidente. J’avais bien dans ma chambre un ensemble de toilette : une verseuse, un bassin, un porte savon en faïence à motifs floraux bleus et un gant de toilette mais outre qu’il fallait penser à le préparer tous les soirs avant de me coucher ce que je faisais très rarement, qu’en hiver il n’était pas rare que l’eau en soit gelée tant il pouvait faire froid dans cette grande pièce sans chauffage et que personne chez moi ne contrôlait mes ablutions, lorsque je m’en servais en hâte c’était juste pour me mouiller le visage et le plus souvent pour décoller mes paupières que la nuit avait collées. La plupart du temps, je préférais même faire cela au robinet de la cuisine, seule pièce chauffée de la mais...
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13 La propreté, la saleté, sont des concepts idéologiques. Nous étions sales mais nous ne le savions pas. Nous étions dans le seul état où nous pouvions être. Les adultes ne se lavaient guère plus que nous, mais ils se salissaient beaucoup moins. La saleté faisait consubstantiellement partie de l’enfance qui nous autorisait à jouer tout le temps et n’importe où. Nous combattre avec des boules de boue n’était pas différent de se battre avec des boules de neige ou n’importe quel autre projectile et nous ne choisissions pas les terrains sur lesquels nous roulions lors de nos corps à corps. Je dois dire aussi que les fermes où il m’arrivait d’aller avec mon grand-père, comme celles de son village natal, à quelques kilomètres de la ville où il nous amenait dire bonjour à d’anciens amis ou frère d’armes nous paraissaient bien sales alors que nous n’étions pas bien difficiles. Mais, avec le tas de fumier devant l’entrée, l’enclos des volailles, etc. leurs odeurs fortes et la négligence généra...
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14 Une fois lâché le frein, le moulin des souvenirs n’arrête pas de moudre sa farine et, un souvenir en amenant un autre, de me faire revivre divers épisodes de cette enfance dont la vieillesse me rapproche. On a toujours moqué le radotage des vieillards qui reviennent sans cesse sur leur passé. Et voilà que j’en suis là. Mais je ne peux pas toujours, sans cesse, nager et pédaler, il faut bien remplir les quelques dix huit ou dix neuf heures de veille dont, dans la solitude, chacun de mes jours sont faits. Alors écrire ou regarder la télévision ou jardiner, et comme le voyage m’intéresse de moins en moins, le premier de ses choix me semble encore le moins difficile. S’adonner à quelque chose comme du tourisme mémoriel, pourquoi pas ! Mais plus de lamentations, vivre c’est résister et je n’ai pas, pas encore complètement la tentation de disparaître. Il y avait sur le vaste plateau granitique presque sinistre qui était au nord de la ville, une petite ferme où mon grand-père m’avait a...
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15 La connaissance que j’ai de mon enfance est approximative, parfois même entachée de complaisance, quelques ilots de souvenirs dans un océan d’oubli. Pourtant dans la mesure où je ne peux demander à quelqu’un d’autre ce qu’elle fut réellement, je n’ai d’autre choix que d’en livrer un récit décousu pouvant même parfois paraître incohérent dans son absence de suites logiques. Mais ce n’est pas parce qu’il m’est difficile de me connaître que je ne vais pas poursuivre, essayer de faire ressurgir, au rythme des mots, ce monde si lointain de mon enfance. J'ai toujours considéré comme suspecte cette capacité infinie de mémoire dont font preuve certains écrivains capables, non seulement de se souvenir avec une précision extrême de quantité de faits très lointains, mais aussi de se remémorer sans hésitation l'intégralité des réflexions, souvent au-dessus de l'âge qu'alors ils s'attribuent, des pensées ou des raisonnements qu'ils ont pu avoir à l'âge de sept ou neuf...
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16 Cette chambre où j’ai dormi seul pendant six ou sept ans occupe une place importante dans mes souvenirs et je ne sais plus par quel bout prendre ce qu’il faudrait que j’en dise. C’était, à mes yeux d’enfant, une pièce immense et je pense aujourd’hui qu’elle devait ne constituer qu’une partie de la pièce traversante de réception de l’étage noble de l’immeuble car la chambre de mon grand-père qui la scindait en trois parties n’avait que des cloisons de bois et le mur qui donnait sur ma chambre était dans sa partie haute fait de vitre. De plus, comme je crois l’avoir déjà dit, une porte condamnée, transformée, par des étagères, en bibliothèque donnait, si j’en jugeais par les bruits qui en parvenaient, dans la chambre d’un voisin, un vieux monsieur, grand père d’un de mes camarades de bande. J’étais ainsi cerné par les vieillards et habitué, toutes les nuits, à écouter leurs ronflements, crachotements, toux, toussotements, expectorations et autres bruits divers du corps humain. Mon gra...
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17 C’est si étrange d’écrire je alors que toute ma vie j’ai écrit dans le registre du il ou du on impersonnel. Écrivant je, j’ai l’impression que ce je est un autre. Je ne fais pas référence ici au Rimbaud de la « lettre du voyant », mon sentiment est plus modeste, moins visionnaire mais il me semble que je regarde cet enfant que je fus avec la distance plus objective de l’adulte que je suis devenu et, ainsi, je ne suis pas toujours sûr de ce que je dis à son propos. Un étrange sentiment de dédoublement. Dans mon souvenir, je le regarde agir, je l’entends rarement parler. Ce qui me revient ce sont des images, des fragments de film muet. C’est si lointain… Bien plus encore, cet enfant que j’étais étant mort à quatorze ans, puis-je être sûr de pouvoir éprouver ses sentiments et ses sensations avec justesse ? Comment ne pas vouloir être objectif, me cantonner derrière la barrière rassurante des faits sans pouvoir les éprouver à nouveau, avec la même force, la même nouveauté ...
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18 Il est pourtant des circonstances où les pleurs, me semble-t-il, auraient dû m’être naturels comme en cet après-midi de mes neuf ou dix ans où j’avais dû commettre une énorme bêtise, peut-être me battre une fois encore avec mon frère et abuser de ma force pour lui faire vraiment mal. Je ne sais. Ce dont je me souviens c’est de la colère de ma grand-mère et surtout de celle du plus âgé de mes oncles. Je me souviens de cris de part et d’autre, de hurlements de ma part même si j’en ai perdu le contenu. Je me souviens que nous étions dans la cuisine et que j’avais fracassé à terre un verre ou une tasse, que j’avais renversé les chaises, que grand–mère me menaçait d’un martinet dont elle ne se servait en fait jamais, que je me roulais par terre et que, au bord de l’hystérie, rien ne semblait pouvoir me calmer. Je revois mon oncle me prenant sous un bras et me descendant dans notre cave aux murs couverts de toiles d’araignée et où, disaient-ils, il y avait des rats, je le vois me posant s...
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19 Vers où continuer ? Il me semble avoir encore tant de choses à dire que je ne sais quel moment de ma vie d’enfance choisir maintenant. L’exploration erratique de cette période de mon existence me met face à un mur : écrire ce n’est pas raconter. Si je racontais, je pourrais décider dans les attitudes de mes auditeurs vers où m’orienter pour si possible les intéresser mais, écrivant, je reste seul face à moi-même au risque d’une certaine complaisance. Les écrivains comme les autres humains sont prisonniers de leur être et ne se dirigent que là où celui-ci les guide, j’ai toujours été réticent devant l’écriture, qui plus est devant l’écriture de moi-même, alors, chaque nouvelle page naît d’une hésitation. Il me semble que j’ai tant de choses à rapporter, qu’il m’est impossible d’éliminer tel moment plutôt que tel autre tous aussi signifiants dans cette espèce d’auto-psychanalyse que, en un moment de nostalgie plus violent qu’un autre, je me suis infligé. Se remémorer, faire l...